Bonjour Jean-Pierre
Non ta réaction n'a rien de brutale, elle est assez naturelle au contraire, et c'est pas la première ni la dernière fois que je l'entends
Je vais devoir commencer par une courte explication sans laquelle effectivement rien n'a de sens. Ensuite j'en viendrai au sujet proprement dit. (du coup ça va faire un looooong post mais tant pis).
Tout d'abord tout ça est de la faute d'Hermann, si si lol

(et amitiés au passage) J'avais posté une réaction à un sujet de Mabelle amorçant un début de réflexion que j'avais juste mis là sans penser à mal. Et puis Hermann m'a demandé (c'est pas grave de le dire) d'en faire un sujet à part entière, j'ai d'abord pas trop su quoi faire et puis je l'ai lancé - lequel sujet a débordé comme on sait et s'est éloigné de l'enjeu initial qu'il portait mais c'est pas important, c'est le jeu des forums... D'abord je pense sincèrement que Alsa n'est pas le lieu de ce genre de débat, non pas parce que les participants ne s'y intéressent pas mais parce que les conclusions auxquelles on peut arriver risquent de déboussoler des gens qui ont déjà beaucoup de mal à appréhender les standards et les stratégies en prod web qu'ils impliquent.... Mais ça tu le sais mieux que moi. Ensuite Laurent a relancé le bouchon sur les questions d'interfaces pour demain et du coup on en est là.
Les idées qui suivent sont des points de vue. Elles sont criticables, démontables, rejetables en miettes ou en bloc, etc. Il y a 15 ans quand j'énonçais des idées sur le devenir du web, hé bien "ç'a n'avait pas de sens" non plus. Ça ne signifie pas que dans 10 ans ce que je dis là sera vrai et vérifié mais ça on ne le saura que dans 10 ans. En attendant on débat et on théorise sur d'éventuelles pratiques à venir sans assurance qu'elles viendront
(fin de l'intro)
Le concept de consultation (contexte d'utilisation) où l'utilisateur
traverse une couche pour atteindre le contenu - et cette couche pour être "traversable" doit être accessible, interopérable, ergonomique, etc. - peut être remplacé par un concept plus large qui est celui d'
immersion, où le l'utilisateur accède au contenu non pas de façon "brute" (non-mise en forme) mais s'immerge dans le contenu pour interagir avec lui. Contrairement à celle de "consultation", l'utilisateur en relation d' "immersion" n'est pas "distant" du contenu : il peut être dedans et
devenir une partie du contenu
en tant qu'acteur. Du coup un "événement web" n'est plus : je consulte un contenu, mais "le contenu et moi interagissons". Avant de me recommander d'arrêter avec la moquette attendez un peu
C'est le cas par exemple de ce forum où nous sommes acteurs de la production d'un contenu : ensemble, ici, nous produisons quelque chose qui sera réutilisable en partie ou entièrement par d'autres (mashups) et ce contenu ne se forme et n'existe que parce que nous tous en sommes acteurs. C'est également le cas par exemple de métavers où des avatars interagissent collectivement ou individuellement sur des objets. C'est le cas aussi d'applis RIA, etc etc.
Un "objet de contenu" n'est donc pas un "objet graphique" mais un objet identifiable par l'utilisateur comme une sorte de "fonctionnalité produisant tel ou tel effet" ayant du sens pour l'utilisateur, que ce soit lire un texte, regarder une vidéo ou cliquer sur un bouton pour arriver à ça. C'est cette distinction entre d'une part
les contenus proprement dits (textes, images, sons, etc) et
les outils pour y accéder qui est remise ici en question : l'idée générale, sans entrer dans des approches plus explicites, est que un "objet de contenu", dans une vision immersive de l'interaction entre utilisateur, interface et contenu, est avant tout un "objet de sens" (j'ose pas dire sémantique qui est un gros mot).
C'est par exemple en Html un <div> contenant un texte, et peu importe que l'utilisateur y lise le texte voulu par défaut (couche auteur) ou y injecte/affiche un autre texte pris dans le contenu global, ce qui importe c'est que ces textes, ou plus exactement l'objet qui leur sert de support (le <div>) soit identifié comme
porteur d'un sens, quel que ce soit son contenu interne. Par exemple encore une prim sur SL (oui je sais les jeux vidéos c'est mal

) qui diffuse des vids de Youtube : peu importe que la vidéo diffusée soit la même pour tout le monde ou que chaque avatar puisse choisir la sienne en consult simultanée), ce qui importe, dans la structuration globale des outils mis à disposition, c'est que cet objet soit
identifiable comme distributeur de vidéos Youtube.
(Et là j'insère une remarque que je n'ai pas faite dans un post récent (pas le temps de retrouver lequel) pour une bonne raison, à savoir ne pas critiquer Florent, mais je trouve que dire qu'après avoir écrit le contenu en flux html brut il fallait découper tout ça en
unités graphique par des <div> m'a dérangé parce que moi je vois plutôt les <div> comme des
séquenceurs de sens à partir desquels structurer, mais bon, cette remarque n'engage que moi)
A partir du moment où les contenus sont envisagés comme "porteurs d'une cohérence", peu importe alors qu'il y ait ou pas une couche auteur proposant en fait des contenus interchangeables
puisqu'au final ce n'est que le sens donné à la structure qui explicite le bout de contenu affiché/distribué/etc.
On peut donc proposer à l'utilisateur d'injecter
ses propres paramètres d'UA appliqués à la structure pour que se crée instantanément sa propre interface personnelle. Ce qui répond en partie à ta question, mais en partie seulement.
Du coup plus de problèmes d'accessibilité ni d'ergonomie. Mais pour cela il faut naturellement qu'existe, au moment de la négociation des contenus entre serveur et UA, une opportunité de passer des paramètres complexes, rôle qui est actuellement tenu par l'UA lui-même (je suis un navigateur web, je suis un interface de monde 3D, je suis ceci ou cela).
On peut aller plus loin en affirmant que si cette structuration des contenus web est un jour atteinte (comment l'atteindre est une autre question), c'est :
- la fin de l'auteur en tant que metteur en scène via sa couche (qui au final n'est qu'une couche individuelle parmi d'autres possibles, sauf que là elle est imposée)
- la fin des contenus structurés n'importe comment, avec actuellement charge à la couche graphique de les remettre en ordre utilisable
- la fin des démarches d'accessibilité/interopérabilité/ergonomie puisque
si un contenu n'est pas accessible ce n'est plus un contenu
- la fin de l'interface
en tant que couche faisant écran (dans les deux sens du terme) entre contenu et utilisateur, et immersion de ce dernier dans le premier en tant qu'
acteur interagissant avec des objets auxquels une "structure faisant sens" préalable donne raison d'être là.
Je me rend bien compte que ce sont des concepts complexes, mais finalement pas plus qu'expliquer il y a 15 ans qu'en déplaçant une flèche virtuelle sur un écran jusqu'à un texte bleu souligné et qu'en appuyant sur un bouton on achète un billet d'avion.
Un exemple : je travaille actuellement en R&D sur un projet perso dont j'ai déjà parlé visant à "exploser" des contenus de documents web en objets 3D dans un univers virtuel. Le but n'est pas de "jouer à", il est de proposer/expérimenter un autre type d'accès aux contenus web dans le cadre de contenus immersifs. Pour l'instant j'utilise SecondLife comme support technique mais demain ce sera n'importe quel type d'UA qui s'y prêtera. On est typiquement là dans le cas d'une réutilisation de contenus 100% en dehors de la volonté auteur. Sur quoi je bute ? sur ces contenus dont la seule structuration est purement graphique. Alors je sais bien que ce n'est qu'expérimental mais des pseudos-contenus de tests
structurés en conséquence, c'est à dire indépendants du format de sortie, permettent à l'avatar de se déplacer dedans, d'interagir, de transformer, de changer les contenus et d'échanger à la fois avec
des objets générés sémantiquement (sur base html pour le moment) à partir du serveur web et avec d'autres avatars présents, mais aussi de "s'extraire" de l'immersion pour consulter ces mêmes objets pour
consulter le site web (en tant que site, sous sa couche auteur) depuis SL en projection de contenus sur un écran (navigateur InWorld perso), mais encore, puisque ce sont des contenus web, de les consulter sur Firefox ou un iPhone ou Lynx ou Jaws ou tout ce que tu voudras.
Et du coup il n'y a plus aucune notion de mise en accessibilité/interopérabilité/ergonomie qui vaille, puisque c'est l'utilisateur en mode immersif qui crée les paramètres et conditions sous lesquels il utilisera/consultera le contenu.
Si un contenu peut être utilisé, il est alors nécessairement accessible, ineropérable, ergonomique et ainsi de suite. Ce qui n'est pas le cas d'un contenu web dont la structuration dépend de l'interface auteur. Ça fait plus qu'une nuance.
Alors bonne question : qu'est-ce qu'un contenu structuré hors-couche ?
1. une suite d'objets porteurs d'informations qu'on peut exploiter à travers un jeu de préférences utilisateurs, lesquelles préférences forment une interface utilisateur "nécessaire, minimum mais suffisante".
2. ces objets sont écrits/décrits de façon normative pour pouvoir être réutilisables aux conditions du point 1, ce qui fait qu'on peut les interchanger dans une logique sémantique, les modifier, les exploser, les réagencer, les mixer, etc.
3. en tant qu'objets normés (selon quel jeu de normes est encore une autre question) ils sont utilisables sur tous types de supports.
C'est là-dessus que je préssent que Sparql a un rôle important à jouer - on verra plus tard si oui ou non - dans la mesure où ça s'appuie sur un balisage "sémantisant" et où les triplets créés semblent offrir les caractéristiques minimales nécessaires.
Je ne sais plus qui (Fred Cazzava peut-être, je n'en suis plus sûr...) a dit qu'il fallait préparer nos contenus web à pouvoir interagir avec nos appareils ménagers domestiques. Ce n'est pas une blague. On doit aussi les préparer à interagir avec toutes sortes d'utilisateurs "immersifs". Deux constats : un, mon frigo se fout de la charte graphique ; deux, en tant qu'avatar (utilisateur immersif) je n'accède pas à ta couche auteur.
Cette deuxième partie répond aussi à ta question (enfin, je crois...)
Je garde les vrais gros mots pour la fin : bien sûr tout ça est entre la fumerie de moquette et le web3D prospectif (wwwéééé... il a osé), mais la question initiale de Laurent était :
Laurent Denis a écrit :
Allez, hop. Vous sémantiseriez comment une interface, vous ?
Il s'agit bien-sûr de ce qui n'est pas exprimable actuellement de manière structurelle, sinon, ce n'est pas drôle.
à laquelle j'ai répondu rapidement
Arsene a écrit :
Moi à terme je ne sémantiserais plus d'interface.
En conclusion de bien trop long billet - alors qu'on est samedi et qu'il ya du soleil dehors... pfff - je persiste et signe : l'interface de demain sera utilisateur ou ne sera pas. Le contenu web de demain sera utilisable sous cette condition ou ne sera pas un contenu.
Tes exemples (pot de confiture) relèvent d'une vision peut-être un peu trop "gutenbergienne" de la relation entre un objet et son utilisateur : elle est construite sur l'opinion que le contenu (l'objet) n'existe que
pré-formé à son usage. On peut aussi penser que c'est une vision ou une conception largement héritée d'une limite technologique qui ne permettait pas de s'affranchir de cette contrainte : pas d'accès au contenu sans la mise en forme auteur qui le fait intrinsèquement être. A mon avis on n'en est plus là. Dans un post il y a quelques années j'avais exposé la notion de "contenu unique>utilisateurs multiples" opposée à celle de "contenu mutiples>utilisateur unique", le premier paradigme étant censé représenter le devenir du web comme média mature et le second l'usage qu'on en fait encore aujourd'hui. Ceci n'en est de mon point de vue que la prolongation logique.
Bon w-e à tou(te)s