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Accessibilité du Web

Bonjour,

Un simple remarque rapide en passant: la possibilité de désactiver la présentation et la configuration du navigateur sont des réponses élémentaires en termes d'accessiblité, dans la mesure où la séparation contenu+structure / présentation est respectée.

<euphémisme lourd>On oublie un peu souvent la responsabilité de l'utilisateur et de son agent utilisateur en matière d'accessibilité : la charge est actuellement, dans la lignée des méthodes d'accessibilité courante, entièrement reportée sur les responsables de contenu (au sens large, la présentation y est incluse). Mais l'accessibilité ne fonctionne pas tout à fait comme cela.</>

En ce sens, le plus grand atout de CSS pour l'accessibilité est le bouton "sans CSS". Quand tous les navigateurs proposeront un véritable gestion des préférences utilisateurs v. auteurs via leur interface user-friendly, ce type de problème pourra commencer à être posé dans des conditions saines. Pas avant.
Modifié par Laurent Denis (27 Oct 2007 - 12:12)
Laurent a écrit :
<euphémisme lourd>On oublie un peu souvent la responsabilité de l'utilisateur et de son agent utilisateur en matière d'accessibilité : la charge est actuellement, dans la lignée des méthodes d'accessibilité courante, entièrement reportée sur les responsables de contenu (au sens large, la présentation y est incluse). Mais l'accessibilité ne fonctionne pas tout à fait comme cela.</>


Je me permets de rebondir sur cette question qui me paraît assez centrale.

Le problème est celui de l'indistinction faite par l'utilisateur entre le contenu distribué (l'ensemble des ressources disponibles sur un document web) et la gestion de ce contenu, gestion envisagée sous le double angle de l'émetteur d'abord (comment l'a-t'il structuré, organisé, rendu cohérent et compréhensible, et quels dispositifs a t'il développé pour rendre possible sa perception et son accès ? etc.) et l'outil de restitution de l'autre : comment l'outil utilisé va t'il représenter ce contenu ?

L'utilisabilité du web ne se présente donc pas seulement sous la double question "traditionnelle" de la structuration et de la restitution des contenus, question dont relève la notion d'accessibilité pris dans son sens courant, mais aussi sous celle de cette indistinction qui pose problème parce qu'elle retarde le transfert de l'intégrale responsabilité de la restitution des contenus du producteur à l'utilisateur. Jusqu'à présent il était admis comme normal que la responsabilité relève du producteur de contenus (responsabilité éditoriale, webmastering, etc.) ; en d'autres termes l'utilisateur attend de l'information structurée et utilisable, ce qui est naturel. Cette attente, selon qu'elle est satisfaite ou pas, détermine aujourd'hui si un site a (ou pas) atteint son objectif.

Or il apparaît que cette attente est une décalque des attentes liées à des technologies antérieures, celles de l'imprimé (galaxie Gutenberg). Les technologies du web sont d'un autre type : elles n'impliquent pas que les contenus soient mis en forme pour prendre leur sens… elles n'embarquent pas l'un pour caractériser l'autre.

Les contenus du web n'ont aucune autre forme qu'une suite humainement inutilisable d'informations numériques. C'est la restitution humainement utilisable (visuelle, auditive, tactile, etc.) qui donne du sens à ces contenus en leur donnant forme. Cette mise en forme n'est pas in fine générée par le producteur mais bien par l'utilisateur via son UA : c'est donc à lui d'en prendre en charge l'entière responsabilité. Il y a bien, d'un modèle à un autre (galaxie Gutenberg > galaxie numérique), transfert de responsabilité quant aux conditions dans lesquelles la compréhension des contenus peut ou va se réaliser.

En rejetant la responsabilité de l' "utilisabilité restituée" sur le producteur ("ce site est génial", "ce site est mal foutu", "ce site est inutilisable", "ce site est vraiment trop moche", "ce site etc…") l'utilisateur se place de lui-même dans un état d'irresponsabilité : à aucun moment il n'a conscience d'être en partie la cause du problème qu'il rencontre.

Si le principe directeur est de distribuer un contenu complet ("contenu unique") dont la mise en forme n'est plus opérée par le producteur mais par l'utilisateur lui-même - dans la diversité de ses besoins, envies, attentes, capacités et possibilités ("utilisateurs multiples") - alors on remet en place l'ordre des priorités : au producteur de structurer, à l'utilisateur de restituer.

Mais tout ceci n'est possible qu'à condition qu'un certain nombre de points soient remplis :
1. les contenus sont débarrassés de toute indication de forme (typo, couleurs, tailles, mise en page…) : les balisages sont utilisés comme "porteurs de sens à restituer"
2. les contenus sont complets (présence de l'intégralité des ressources)
3. les contenus sont accompagnés d'un dispositif permettant l'organisation d'une restitution pertinente et personnalisable (auto-utilisabilité)
4. les utilisateurs apprennent à se servir des outils dont ils disposent.

Si les points 1. et 2. sont relativement simples à mettre en œuvre, les points 3. et 4. sont en revanche plus complexes à mettre en place.

Pour restituer un contenu de façon utilisable, deux critères impératifs doivent être remplis :

1. le contenu attendu a été trouvé
2. il a été rendu "orienté-utilisateur"

Le premier point, le "contenu trouvé" (l'essentiel de cette mission a été confiée à Google mais ce dernier pourrait bien assez vite ne plus être capable de la mener à bien) nécessite qu'au regard des millions de documents Internet disponibles, les contenus produits contiennent des "systèmes de repérage à fin de rapatriement" qui permettent à ces contenus d'être trouvés et rapatriés sur l'UA de l'utilisateur. Il y aurait tout un travail à mener là-dessus (sémantiques particulières, balisages spécifiques type micro-formats, etc…)

Le second point ("orienté-utilisateur") signifie que des dispositifs ont été conçus, développés et mis en place pour qu'une fois ce contenu trouvé et rapatrié il devienne utilisable par l'internaute. Des approches spécifiques telles qu'accessibilité ou interopérabilité ne répondent que partiellement à cet usage : elles garantissent plus ou moins que les contenus seront consultables et que sous une certaine mise en forme leur mise en sens sera assurée ; elles ne s'adressent donc qu'à des contenus déjà préalablement porteurs de cette mise en forme.

Le problème est qu'alors on n'autorise pas (ou alors très faiblement ou très incomplètement) l'intervention de mise en sens par l'utilisateur : les menus sont donnés dans un ordre donné, les pages organisées selon des hiérarchies spécifiques, les images placées et argumentées, etc. ; le transfert de responsabilité ne peut donc pas se réaliser et l'utilisateur est toujours placé en situation de dépendance par rapport à ce qui lui est donné. Certes, dans l'idéal il peut le modifier, le traiter, le transformer, l'adapter, etc. mais dans l'idéal seulement parce que les dispositifs permettant cette autonomisation responsable de l'utilisateur ne sont pas implémentés*. Tout ce qu'on trouve actuellement, c'est la possibilité d'utiliser des fonctionnalités liées à l'UA permettant d'intervenir sur du déjà mis en forme. Même si ces mises en forme ne sont pas contraignantes - ou beaucoup moins - et autorisent une certaine latitude d'intervention de la part de l'utilisateur, elles préexistent à la décision de ce dernier de les faire-être, et donc conditionnent le rôle de l'utilisateur de ressources web à celui que le producteur lui fixe par avance. Cette façon de faire n'exploite pas les possibilités offertes par le média.

La gestion de l'organisation des contenus web par l'utilisateur lui-même doit être au cœur des démarches d'amélioration des contenus et services (c'est peut-être au fond ce qui se cache derrière un "produit" web 2.0 n'ayant pas encore atteint l'entièreté de sa formalisation théorique ?). Il y a là tout un travail à mener indépendamment des démarches de type W3C-WAI-accessibilité sur la structuration des contenus et les dispositifs qui doivent les accompagner, portant d'une part sur la mise en place progressive de dispositifs favorisant ce transfert de responsabilité et de l'autre sur la mise en place progressive d'outils éducatifs destinés à l'utilisateur, expérimentant de façon rationnelle cet ensemble de dispositifs et tenant compte des avancées technologiques, des habitudes utilisateurs, des possibilités d'interfaçage offertes par les UA normalisés et des langages disponibles.

* on peut imaginer des dispositifs permettant de ne récupérer que les menus, que les images, etc etc.

<edit>Conceptuellement tout le monde comprend comment fonctionne une page dynamique : elle n'existe en dur nulle part, c'est l'utilisateur qui la génère à la volée. Là c'est pareil ; le document web n'existe nulle part sous forme utilisable : c'est l'utilisateur qui le génère en tant que mise en forme conformément à ses besoins/envies/contraintes</edit>
Modifié par Arsene (30 Oct 2007 - 11:01)
Arsene a écrit :
Conceptuellement tout le monde comprend comment fonctionne une page dynamique : elle n'existe en dur nulle part, c'est l'utilisateur qui la génère à la volée. Là c'est pareil ; le document web n'existe nulle part sous forme utilisable : c'est l'utilisateur qui le génère en tant que mise en forme conformément à ses besoins/envies/contrainte


On commence à voir apparaître ce genre de choses.

Ce qui est rigolo, c'est que le format le plus utilisé pour ça n'est pas HTML, mais RSS.
Smiley cligne oui et non... RSS n'est spécialement formaté pour transporter du contenu aussi riche et complexe que peut l'être un document web.
Sujet très intéressant Smiley smile

Je pense aussi que les pistes à explorer sont du coté des flux rss et des agrégateurs de flux.
Je prends comme exemple Netvibes : on peut choisir d'afficher le contenu de ses flux directement dans l'agrégateur. Ainsi, pour tous les flux, on retrouve les éléments constitutifs du contenu (nom du site, titre de la page, titres, liste de billets, texte) à la même place :
http://img339.imageshack.us/img339/6296/netvibescq3.th.jpg
Il existe peut être déjà à l'heure actuelle des agrégateurs qui permettent d'afficher ces éléments à l'endroit et sous la forme qu'on souhaite.

Mais je me pose une question au sujet de "l'appropriation" par l'utilisateur du contenu des sites web : A l'heure actuelle, même si c'est secondaire par rapport au contenu, la mise en page et la structuration du contenu, sont aussi utilisés pour faire passer des messages à utilisateur, qui s'ajoutent à ceux du contenu lui même. Ainsi, va t'on commencer à reléguer au second plan le travail qui peut être effectué sur le graphisme d'un site web si la tendance se généralise d'offrir la consultation d'un site web à l'utilisateur sous la forme qu'il aura choisi ?
buh31 a écrit :
Ainsi, va t'on commencer à reléguer au second plan le travail qui peut être effectué sur le graphisme d'un site web si la tendance se généralise d'offrir la consultation d'un site web à l'utilisateur sous la forme qu'il aura choisi ?


Dans ce cas la les graphiste vont tous se retrouver au chomage ou à devoir développer des Kit-Graphique ! Smiley biggol
Arsene a écrit :
oui et non... RSS n'est spécialement formaté pour transporter du contenu aussi riche et complexe que peut l'être un document web.


Je suis bien d'accord. Je souhaitais simplement souligner les usages.

Peut-être qu'on devrait renommer XHTML 2 en RSS 3.0 et regarder ce qui se passe Smiley cligne .

Plus sérieusement, si on regarde à quoi ressemble les agrégateurs en ligne à l'heure actuelle, on constate que HTML est utilisé pour décrire l'interface, et que le contenu est fourni par RSS. C'est valable également pour la plupart des systèmes de widgets. Il y a une foultitude de services Web qui utilisent un format quelconque, souvent bidouillé maison, pour le transport du contenu, et qui n'est transformé en HTML qu'à la toute dernière étape, à des fins de présentation.

Je me demandais donc benoîtement si on ne devrait pas laisser HTML devenir le langage de présentation et d'interface qu'il rêve d'être, et renommer XHTML2 pour le dégager du passif d'HTML et lui permettre de devenir le langage de transport de contenu qu'il devrait être.
Modifié par Lanza (30 Oct 2007 - 14:53)
@ buh31

La question n'est pas tant celle de contenus muti-sources à réunir en un endroit donné (principe Netvibes) que celle d'un document web servi comme non-formé. C'est la responsabilité de l'utilisateur que de déterminer sous quelle forme il va le restituer.

@ Cocci-uk

En 1920 il y avait un graphiste ? dans chaque quartier... Smiley lol
Je voulais rajouter une petite question dans cette discussion :
Si la finalité et de pouvoir donner à l'utilisateur la possibilité d'organiser, de structurer, de choisir et d'afficher comme il veut le contenu qu'il consulte, il va se poser le problème du "comment" de la monétisation par de la publicité de cette nouvelle façon de consulter les contenus.
Jusqu'à maintenant le producteur de contenu sait qu'il peut plus ou moins imposer la lecture de la publicité affiché.
Il existe des plugins firefox pour bloquer l'affichage des publicités, mais cela n'est pas très répandu et c'est plutôt un truc d'initié, mais si à l'avenir l'utilisateur peut facilement choisir son contenu, il y aura peu de monde je pense qui cochera la case à cocher "je veux afficher le contenu publicitaire des pages que je consulte."
@ Lanza

...auquel répond la problématique (enfin résolue ?) de la séparation contenu-aspect : l'usage de CSS change de main et devient un outil d'utilisateurs et non de producteurs. Du coup cette séparation "idéale" prend corps.
(bon j'arrête avec la moquette, promis)
Arsene a écrit :

(bon j'arrête avec la moquette, promis)


Non, continue: tu viens déjà de redécouvrir le tout premier navigateur Web (et son comportement), malheureusement oublié depuis. Les retours aux sources ont du bon, parfois Smiley cligne
Modifié par Laurent Denis (30 Oct 2007 - 17:42)
Salut,
@Arsène
Belle intervention que voilà même si surprenante et un peu paradoxale pour quelqu'un dont le métier est justement de mettre en forme des contenus.
Arsene a écrit :

Les technologies du web sont d'un autre type : elles n'impliquent pas que les contenus soient mis en forme pour prendre leur sens…

Et pourtant je ne devrais pas t'apprendre, toi qui es du métier, que la manière dont tu mets en forme un contenu et sa typographie influence son interprétation voire sa compréhension, ou alors je n'ai pas bien saisi la porté de cette phrase? Smiley cligne
Arsene a écrit :
elles n'embarquent pas l'un pour caractériser l'autre.
Pas très clair.

Arsene a écrit :
Les contenus du web n'ont aucune autre forme qu'une suite humainement inutilisable d'informations numériques.
Et pourtant un texte numérique est manipulable : on peut le copier, l'imprimer... ça reste des actions humaines.

Arsene a écrit :
C'est la restitution humainement utilisable (visuelle, auditive, tactile, etc.) qui donne du sens à ces contenus en leur donnant forme.
Pas compris. Pour moi, le sens n'est conditionné que par sa mise en forme, le type de support (affiche, dépliant...), la psychologie du récepteur/utilisateur et plus largement par le contexte de réception/utilisation. Suis-je hors sujet?

Je pense que la mise en forme des contenus transféré uniquement vers la responsabilité des utilisateurs est une idée qui fait peu de cas de l'état d'"impatience" ou de l'incompétence de certains internautes vis à vis de l'outil informatique. Et je ne suis pas sure qu'un investissement personnel (auto-formation...) soit facilement accepté par tous.
Mis appart ça, et c'est peut-être là que se situe la difficulté majeure amha, quel serait l'espace de liberté que l'on peut déporter sur l'utilisateur pour que la mise en forme finale du contenu reste fidèle au message qu'à voulu exprimé l'auteur et à ses intentions?
Modifié par Hermann (31 Oct 2007 - 10:50)
@ Hermann

Le prob est pas si complexe Smiley cligne Pour que la mise en forme conditionne le sens (et tu cites à raison les médias papier construits sur cette logique là, logique que l'on connaît et que l'on doit maîtriser quand on est graphiste, précisément) il faut que la forme ne puisse en aucun cas être changée, sinon c'est une partie du contrôle du sens qui s'en va : imagine par exemple un livre non-relié dont les pages se présentent séparément dans n'importe quel ordre... dur dur de faire remonter le sens. Idem pour un journal sans distinction typographique entre titres, intertitres, textes, etc.

Mais à partir du moment où la forme peut prendre celle que l'utilisateur voudra (specs perso des interfaces d'UA) alors ce qui porte le sens devra être autre chose que ce qui porte la forme... On peut donc commencer à imaginer ne plus distribuer de forme du tout.... (mmmmh c'est bon la moquette)

<edit>Très concrètement, à partir du moment où l'utilisateur décide de l'aspect que prendra <h1> et que sa décision sera prioritaire, je n'aurai plus à définir <h1> autrement que par défaut. Ce par défaut empêche tout portage de sens autre que <h1>. </edit>
Modifié par Arsene (31 Oct 2007 - 14:31)