Ah, sacré Nielsen ! Proposer DEUX sites mobiles à maintenir en parallèle du site "desktop" est carrément aberrant, non ? REviendrait-on à l'époque IE-NS ?
Il existe des technologies pour gérer les contenus envoyés aux mobiles permettant de venir à bout des problèmes qu'à juste titre il pointe du doigt (utilisabilité médiocre, non-ergonomie, faible bande passante, petites surfaces, disparité des outils, etc.), notamment
en partant d'un contenu unique et en n'affichant que les parties destinées aux mobiles et sous un aspect designé pour eux.
La grosse question, souvent évoquée ici, est celle de la reconnaissance que l'UA est un mobile, à laquelle il n'apporte pas de solution concrète. Une autre question très importante qu'en revanche il n'aborde pas du tout est celle, autrement plus sidérante, que pose l'existence de "versions mobiles" maintenues en parallèle : comment, en surfant de site en site, passer à coup sûr de version mobile en version mobile ? Je suis sur un site A spécialement désigné pour un mobile, OK. Je clique un lien pour atteindre le site B et j'arrive où ? ... sur la "version desktop" de B. Je fais quoi alors, je cherche la version mobile - à supposer qu'il y en ait une ? Il est totalement déraisonnable de penser que cette affaire de double (triple ?) site solutionne quoi que ce soit : ça présuppose donc que l'utilisateur arrivera toujours par défaut sur une version "desktop" à peu près inutilisable, et qu'à partir de là, et à condition (1) qu'il parvienne à la charger, (2) à la consulter et (3) à l'utiliser, il se débrouillera comme il pourra pour trouver l'autre... Ça c'est n'importe quoi.
D'autre part, la part des écrans classé 1 par Nielsen (1. Regular cellphones with a tiny screen) n'est pas conçue pour (ni utilisée par...) les internautes mobiles. La part classée 2 va être très vite remplacée par du wide-screen, tactile ou pas. Construire une stratégie web mobile là-dessus ne tient pas. C'était vrai autrefois dans le desktop où il se passait des années avant que des changements majeurs se propagent, mais en mobile un an ou deux suffisent pour que les configs soient radicalement transformées. Je rappelle que les premiers 320x240 (ce qu'aujourd'hui on regarde comme de "petits écrans") n'ont que 3 ou 4 ans et que les "grands écrans" tactiles (wide-screen 400px) moins de deux ans. Et l'iPhone n'a qu'un an et demi.
Enfin le "GUI experience through a limited viewport" (utilisation d'une interface graphique utilisateur dans un espace limité) n'a plus beaucoup de sens comme concept à l'heure des netbooks, comme on en a déjà parlé souvent.
On n'a pas besoin d'une "version mobile" pour chaque site, mais d'une "édition mobile" pour chaque site. Ça fait une grosse différence. L'aberration consisterait à considérer que le couple (x)Html+Css viendrait à notre secours en gérant/masquant/réarrangeant les contenus : le problème est que ces contenus n'auraient jamais dû initialement quitter le serveur . C'est donc une gestion fine des contenus et de leur structuration, appuyée sur des langages serveurs, qui feront le web mobile, et sûrement pas la maintenance (avec le coût humain, énergétique, économique, gestion des erreurs, mise en conformation des contenus, etc. que cela implique) de deux sites distincts.
Juste un exemple : imaginons une boutique en ligne avec deux sites (desktop + mobile) et que suite à une mauvaise conformation des contenus les prix ne soient pas les mêmes... vous imaginez la suite ? Alors qu'avec un contenu unique servi sous deux éditions différentes la question ne se pose pas.
Alors pour moi cet article est un pur article d'un théoricien brillant, capable de poser avec intelligence et acuité (Nielsen quand même c'est pas n'importe qui) le doigt sur les vrais problèmes mais qui vire à la cata dès la première esquisse de proposition pratique.
On ne doit jamais oublier que l'apprentissage de la souris à déplacer sur un tapis et son équivalence écran d'une flèche glissant d'un bord à l'autre qu'on utilise en cliquant du doigt quand le texte bleu devient vert a été un apprentissage mine de rien assez complexe (sauf pour vous bande de djeunes qui êtes nés avec cet écran bleuté qui clignotait au dessus du berceau) et que de la même façon un apprentissage du web mobile DEVRA être effectué pour que l'expérience utilisateur soit pleinement satisfaisante. La difficulté est que pour le web "desktop" un outillage technique complet (souris+clavier+écran) existait déjà depuis plus de 10 ans lors de l'arrivée du web, ce qui n'est pas le cas du mobile. La conséquence est qu'il faudra attendre une génération d'internaute nés avec un web mobile dans le berceau pour que tout le monde soit content, et ça Nielsen n'y peut rien.